Une retraite de silence à l’Abbaye Val Notre Dame

Arrivée à l’Abbaye, le frère André m’accueille. Il a les yeux bleu comme le ciel et un regard joyeux et l’âge difficile à identifier. Pourquoi je trouve curieux qu’un moine cloîtré soi si habile avec son ordi et son logiciel sans doute digne des grands hôtels. Une fraction de seconde plus tard, je sors de ce jugement, je suis ici pour être dans l’accueil, le non jugement, la contemplation et la méditation.

Ensuite c’est le frère Jean-Marc, le responsable de l’hôtellerie qui m’accueille et m’explique le fonctionnement de l’Abbaye pour mes 4 jours de retraite silencieuse. Il parle joyeusement, il à l’air d’un vrai  « pince sans rire » une blague n’attends pas l’autre, on sent bien son côté franc et rieur, voilà sans doute pourquoi c’est lui qui effectue la tâche à l’accueil. Il me dit qu’il à 82 ans, je vois 2 appareils bien branchés à ses oreilles. Il me dit qu’il me trouve dont belle et que par chance qu’il ne m’a pas rencontré quand il avait 15 ans! on rigole ensemble près de l’accueil ou s’est permis de parler. Dans l’ascenseur qui qui me mène à ma chambre, il me prend le visage avec une infinie tendresse (comme un papa qui découvre le visage de son bébé) et me souhaite de bien me reposer durant ma retraite. Je suis émue de sa franche sollicitude.

Je découvre ma chambre avec émotion, elle est belle, minuscule avec un lit mural, un fauteuil et un petit bureau, et un joli balcon. Il m’apprends que celle des moines qui vivent ici à l‘Abbaye sont identiques à celle-ci.

Je pars explorer cet environnement qui sera le mien durant 4 jours. Une belle énergie règne entre les murs de cet Abbaye. Je marche doucement, en pleine conscience, je garde mon attention sur mon souffle et sur le chant des oiseaux. Je croise même une marmotte, comme si elle me souhaitait la bienvenue dans cette nature bucolique.

Dans mon exploration, je découvre un joli banc en face d’un espace majestueux. Je suis accompagnée d’un bon vent qui fait chanter les feuilles des arbres, j’entends aussi un  concert de crapauds dans l’étang tout près. Un petit crachin m’effleure tout doucement. Je suis bien. Je prends le temps de prendre le temps.

Je retourne à ma chambre pour m’installer et faire un peu de lecture. Il pleut en ce moment, qu’à cela ne tienne, je sors et marche. Je m’arrête sous un grand pin qui déploie ses branches pour me protéger. Avez-vous déjà remarqué comme le bruit des gouttes d’eau qui tombent en forêt sont un délice pour les oreilles? Avez-vous déjà pris le temps de regarder les gouttelettes tomber sur les petites plantes au sol? c’est comme un grand ballet de petits mouvements subtiles, un danse contemporaine de la nature. ben ouais, j’ai pris le temps de prendre le temps de regarder et sentir ça. Contempler les gouttes me permets de me poser. Ça me fait rendre encore plus compte du besoin de s’enraciner dans le moment présent.

Le souper est servi à 17h… les tables à la salle à manger forment un grand U. C’est chouette de voir les 14 retraitants (il y a 14 chambres) se jeter des regards furtifs. Moi j’ai choisi d’être au centre, il y a des énormes fenêtres qui donnent sur la forêt. c’est bon de manger en silence en contemplant la nature. La nourriture est excellente.

Ensuite je me retire pour méditer et colorier des mandalas. Étonnant, voir fascinant le pouvoir des mandalas sur le lâcher priser du mental. Je m’endors au son des grillons, enchantée de cette première journée de silence avec moi-même.

J’entends des cloches, j’ouvre un œil, il fait très noir, il est 4h du matin, c’est ça  comme dans la chanson: « sonnez les matines »? Je me rendors. 6h45,  3 coups de cloche… silence… 3 coups de cloche… puis 23 coups de cloche. (Mon grand papa était sacristain de l’église de sa paroisse, ça me rappelle quand, toute petite il m’emmenait avec lui pour sonner les cloches, j’étais trop petite pour savoir quelles cloches correspondent à quelle prière) Je ne fais pas la prière…

Mais du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé le son des cloches (voilà pourquoi dans ma pratique de la massothérapie, je travaille beaucoup avec les bols tibétains et le carillon Koshi) Du plus loin que je me souvienne, j’aime les lieux de culte, j’aime les cloches, j’aime l’appel à la prière qui vient des minarets, ça appelle un temps d’arrêt, un retour à soi. Étant  attirée par les philosophes, le bouddhisme, je suis accueillie ici libre de mes choix et ça me procure un sentiment de félicité.

Pendant ces 4 jours, loin de mon « train train » quotidien, je me ressource entourée de verdure, de silence et aussi des chants de la nature.

Après le souper de cette 2ieme journée, je suis assise tranquille, un retraitant me dit bonjour… je le salue discrètement de la tête. Il me demande de lui lire le tatouage que j’ai sur le bras, au moment ou je commence à lui parler, une retraitante s’approche de nous et nous dit:  » oh puis-je vous parler? j’ai besoin de parler! pourquoi les crapauds ont le droit de parler eux? Je trouve ça difficile de ne pas parler! en fait elle nous parle sans arrêts pendant au moins 3 minutes, je suis prise d’un fou rire de l’entendre parler à toute vitesse! Elle est anxieuse de se retrouver face à elle-même et ce silence. On se dirige vers le solarium tout à côté (car on se fait littéralement arracher la peau avec les moustiques) On discute doucement et peu à peu, ça s’estompe, le silence revient. Même si moi, je ne trouve pas difficile d’être dans le silence, ce petit moment de rigolade me fait du bien.

18 moines vivent ici (ils étaient 178 avant) Ce sont en fait les moines qui vivaient à Oka qui sont venu s’installer à St-Jean de Matha il y a quelques années. A part frère André à l’accueil et frère Jean Marc qui s’occupe de l’accueil, de la cuisine et du bon fonctionnement de l’hôtellerie, on remarque à peine les autres, ils vivent de leur côté dans le cloître. Ils font la prière 8 fois par jour, la première étant à 4h du matin. Même si nous sommes chez eux, nous sommes dans notre monde et eux dans le leur.

J’aime le mystère de cet Abbaye, (les 18 moines qui y vivent sont si vieux, je me demande qui prendra la relève d’un si beau lieu qu’ils entretiennent avec grand soin) Je suis ici constamment accompagnée d’un perpétuel concert de la nature. Celui du soir est particulièrement impressionnant à mes oreilles, on dirait des milliers d’êtres vivants qui se chantent la sérénade. Le jour, le concert des oiseaux est pour moi empreint de plus de douceur.

Avec ce temps d’arrêt, je constate à quel point le contact direct avec le silence et la nature constitue une expérience sensorielle régénératrice. Marcher en forêt en étant attentive aux sensations et aux plaisirs que procure cette expérience du silence total, j’en ressort apaisée, ressourcée. Ce plaisir se transmet à l’esprit, mes pensées sont plus nettes et plus réfléchies.

Je vous conseille, si vous aimez, de vous offrir un moment à l’Abbaye Val Notre Dame. Moi je leur ai dit: « à l’année prochaine »

Namaste
Claude